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Dix grammes au bout des lèvres
25 mars 2007

II

Nous sommes samedi matin, tu sors acheter les journaux, il est encore tôt, le jour n’est pas totalement levé.

Tu as froid, tu avances en te frottant les mains, et observe la fumée blanche sortir de ta bouche à chaque expiration.

Tu arrives dans la petite boutique toute sombre. Il n’y a pas grand monde, juste une jeune fille dans le fond. Tu prends Le Monde, passe devant les quelques bouquins en rayon. Le genre de livre que les vacanciers achètent le matin du départ parce qu’ils n’ont plus de lecture, que les écoliers achètent le dimanche matin, parce qu’ils ont oublié de le faire la veille et qu’il ont pour devoir de le lire.

Généralement ces livres sont plus chers qu’en librairie, mais ce matin, tu n’as pas envie de rentrer chez toi, tu t’imaginerai bien en terrasse de café, avec un jus d’orange, un croissant et un bon roman… a regarder les premiers rayons du soleil se poser sur ta table et venir réchauffer ton visage.

Tu pourrais le faire, il suffirai pour cela que tu préviennes chez toi. Tu n’hésites pas longtemps, prends ton téléphone et envois un sms prévenant de ton programme. En temps normal, tu aurais culpabilisé de les mettre devant le fait accompli, devant cette décision purement égoïste, mais ces temps ci, tu ne supportais plus l’ambiance familiale, la pression que tu avais sur le dos, l’hypocrisie polie et le « je m’en foutisme » ambiant.

Tu pris un roman, facile et léger, cynique et sarcastique, un roman correspondant à ton humeur du moment, tu pris « L’Amour Dure trois ans » de Frédérique Beigbeder. Au moment de partir à la caisse, tu te retrouva nez à nez avec la jeune fille qui se trouvait au fond quand tu es entré, elle avait dans les bras pas moins de cinq magazines de mode, et Le Monde, elle aussi, ce face à face que tu n’attendais pas, te fit peur, et tu laissa échapper ton livre. Elle eu l’air gênée, te regarda ramasser l’ouvrage, et tu vus qu’elle en lisait le titre. Un sourire rêveur se dessina sur son visage, elle avait le nez retroussé, les yeux gris. Actuellement, ses yeux était ailleurs, probablement en train de penser à un jeune homme.

La pensée qui te traversa l’esprit te surpris dès que tu l’eut réalisée, quand tu avais lu dans ses yeux cet amour passionné, nostalgique et romantique tu t’étais dis « bon sang, ce que j’aimerai que de tels yeux pensent a moi, d’une si belle façons, après la lecture du titre d’un bouquin! ». Ton esprit se mit à délirer, imaginant mille et une raisons qui auraient pu provoquer chez cette jeune femme, un tel éclat.

Mais, comme toujours la réalité te rattrapa, tu devais passer en caisse, la femme derrière le comptoir, faisait cliqueter son stylo quatre couleurs d’impatience, et un vieux couple qui était entré dans la boutique au moment de ton « face à face » avec la jeune femme, attendait maintenant de payer Tele 7 jours.

Quand tu eu payé, elle était partie. Tu sortis de la boutique, regarda à droite, puis à gauche, et tu vis, cette silhouette, des très hauts talons noirs,de dix centimètres, des jambes couvertes de collants de laine noire, une robe courte en cachemire gris pâle, qui dansait sur ses cuisses à chacun de ses pas, un foulard blanc à pois noirs, les cheveux châtains clair, avec de légers reflets roux. Elle avait le pas vif, devait certainement avoir froids, elle traversa le boulevard et tourna à droite, vers le Monument aux Morts.

Quelques minutes plus tard, tu traversais le boulevards à ton tour, pour te rendre sur cette petite place qui t’as toujours faites pensée à une place de village. Petit, tu y aillait souvent avec ton père, le matin, pour préparer le brunch avant que ta mère ne se lève. Aujourd’hui, ton père ne fait plus ce genre de choses, trop occupé à dormir lui aussi, il pense sûrement que les preuves d’amour n’ont plus de raison d’être après un certain nombre d’années passées en couple.

Aujourd’hui, ce sera donc seul que tu petit déjeunera, avant d’aller rejoindre tes amis, d’oublier ta vie, d’aller prendre des drogues, ces drogues que tu prend en te disant que tu es un artiste, que tous les artistes fond ça…parfois tu te demande en quoi tu es un artiste, et puis tu te souviens, tu es un artiste parce que comme disait Shakespeare dans « Comme il vous plaira », « La vie est une pièce de théâtre. Et tous, hommes et femmes, n’en sont que les acteurs. Et notre vie durant, nous jouons plusieurs rôles. », tu es donc un acteur, et personne n’oseras te contredire, les acteurs sont des artistes.

Parfois, tu écris des poèmes, enfin des bouts de poèmes, tu t’essaye à la littérature, commence plusieurs romans, ne les finis jamais, si tu vidais ton bureau, Dieu seul sait combien d’incipit tu y trouverais.

Tu te dis que tu es trop jeune, que tu n’as pas acquis assez d’expériences, mais que dans quelques années, tu y arriveras, tu écrira un roman, un roman qui sera lu, aimé, mais aussi détesté, pourquoi ne pas s’offrir ce luxe après tout?

Pour l’heure, tu t’attablais à la terrasse d’un café, comme dans ton imagination, passais commande, et sortis le livre de sa poche. La vendeuse avait pris soit de le glisser dans une enveloppe de kraft .

C’est fou, ce que tu aimais les livre de cette collection, la couverture cartonnée beige, lui donnait un quelque chose de précieux, tu pensais que pour un livre c’était la moindre des choses que d’avoir un habillage précieux..

Tu fixa la couverture, puis regarda en direction du Monument aux Morts, en face de toi, sur un banc, tu reconnus une silhouette, qui te semblait être celle de la demoiselle de ce matin.

Elle était vraiment troublante, mais tu ne pouvais pas dire pour quelle raison.

Maintenant que tu regardais celle, que tu pensais être elle, tu te posais des questions, elle n’avait sûrement pas ton âge, aucune jeune fille de ton âge n’oserai aller s’asseoir sur un banc, seule avec des journaux. Les filles que tu connaissaient auraient toutes eût peur d’être vus seule dehors.

Cette fille la était sûrement plus âgée, mais peut importe elle te plaisait, et si elle n’était pas plus âgée, alors elle te plaisait encore plus.

On t’as toujours dis que tu aimais ce qui dérangeai.

Une fois ton petit déjeuner terminé, et ton livre commencé, tu paya l’addition, et partis.

Tu pris la direction du Monument aux Morts, sans savoir pourquoi, sans même y réfléchir. Tu ne lui parlerai sûrement pas, mais tu voulais la regarder, et avant toutes choses, être sur que ce soit la jeune femme de la boutique.

Si c’était elle, tu te mettais au défi de t’asseoir et de lui sourire, si ce n’était qu’une femme parmi d’autre, tu continuerai ton chemin sans t’arrêter .

Tu traversa le boulevard, à cette distance, tu pouvais reconnaître sa robe de cachemire gris. La position assise faisait remonter le bas de sa robe, toi qui la regardais de haut en bas, tu ne put t’empêcher de constater qu’elle portait des bas de laine et non des collants. Cela t’attirait, elle possédait le « quelque chose » en plus, qui faisait qu’elle pouvait ce permettre ce genre de petite imperfection, sans avoir l’air vulgaire.

Au moment ou tu arrivais réellement en face d’elle, elle répondit au téléphone ce qui t’empêcha de voir son visage clairement.

Tu ne pouvais tout ne même pas manquer de constater, cet éclat qu’elle avait dans les yeux à partir de ce moment, tu ne pouvais t’empêcher de constater que plus la conversation avançait, plus éclat grandissait dans les yeux de cette poupée de porcelaine, au teint si pâle, qu’il paraissait transparent..

Alors qu’elle parlait, elle griffonnait quelque chose sur le banc, tu trouvais ce geste inattendu de la par d’une jeune fille aussi élégante Son élégance donna tous son charme à ce geste, ou peut être que c’est le geste qui donna son charme à cette élégance maîtrisée

Quoi qu’il en soit, cela te plu, et un mystère de plus vint s’ajouter à la description de cette demoiselle.

La conversation semblait toucher à sa fin, et sur ses lèvres, un sourire se dessinait, pourtant, dans ses yeux, l’éclat du début était comme noyé derrière une vague de désespoir . Tu enviait son interlocuteur, qui provoquait en elle tant de joie et de tristesse, mélange que seule une véritable passion peut produire.

Elle raccrochait et allumait une cigarette, tu faisais semblant de lire, l’observais toujours, puis, tu vis apparaître entre ses cils, une larme si claire et si belle que tu la regarda rouler le long de sa joue, d’autres arrivèrent, en silence, toujours en silence; L’une d’elle avança lentement, puis se posa sur sa lèvre supérieure Tu aurais tant voulu être une larme.

Elle ne semblait pas t’avoir remarqué, quand elle leva les yeux. D’abord sur ton livre, puis sur toi, quand elle en eut lu le titre.

Tu lui souris. Elle fit sortir un nuage de fumée grise entre ses lèvres légèrement ouvertes, et te rendit ton sourire, d’un air timide.

Elle rassemblait ses affaires, essuyait les dernières larmes qui coulaient sur ses joues, tirait une dernière taffe sur sa marlboro, se levait, puis jetait son mégot, en même temps qu’un dernier regard sur toi.

Tu la regardais s’en aller, sa jupe dansant encore. Une fois qu’elle fut trop loin pour être à porté de ta vue, tu te leva pour voir les mots qu’elle avait écrit sur le banc.

Tu lu: « Vous vous étiez rencontré dans un supermarché,

Elle pleurait, ressemblait à une poupée »

Cette phrase t’intriguait, comment pouvait elle avoir eu l’idée d’écrire cette phrase sur un banc, alors qu’elle était en pleine conversation téléphonique? Comment pouvait elle avoir eu l’idée d’écrire cette phrase?

Tu te dis alors que la poupée qui pleurait, tu ne l’avais jamais rencontré au supermarché, mais que tu l’avais vu assise ici, sur ce banc.

Tu pris le marqueur dans ta poche, et ne pus t’empêcher d’écrire à ton tour deux phrases pour compléter ce début étonnant.

Tu écrivis: «  Tu l’as regardé, fixement, tu l’admirais,

Elle a levée la tête, t’as fixée, de ses yeux mouillés »

Après tout pourquoi pas?

Puis, tu est rentré chez toi.

Tu ne savais pas, que chaque week end, elle venait tous les matins sur ce banc, pour échapper à sa vie.

Comme c’est navrant.

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